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La modification de la durée de travail d’un salarié à temps partiel impose un avenant précisant la répartition des horaires

La modification de la durée de travail d’un salarié à temps partiel impose un avenant précisant la répartition des horaires

La modification de la durée du travail d’un salarié à temps partiel ou de la répartition de son temps de travail entre les jours de la semaine ou entre les semaines du mois, doit être formalisée par un avenant contractuel, quand bien même il s’agit de modifications temporaires. L’avenant doit préciser, en particulier, la nouvelle durée contractuelle de travail, ainsi que la nouvelle répartition de cette durée du travail entre les jours de la semaine, ou entre les semaines du mois.

A défaut, l’employeur s’expose à une requalification du temps partiel en un temps plein, ce depuis la première modification irrégulière du temps de travail.

C’est l’enseignement, qui peut être particulièrement onéreux pour l’employeur en l’absence de tout élément contractuel, qu’il faut tirer de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 23 novembre 2016.

1. Les faits de cette espèce

Une salariée a été embauchée le 4 décembre 1997 en qualité de caissière, pour une durée hebdomadaire de 26 heures.

Afin de remplacer, pendant une période limitée, une chef caissière, elle a signé plusieurs avenants temporaires à son contrat de travail, ayant eu pour effet de porter sa durée contractuelle de travail de 26 heures à 31 heures hebdomadaires, et d’augmenter sa rémunération.

Elle est devenue chef de caisse pour un temps de travail hebdomadaire fixé à 31 heures à compter du mois de novembre 2007.

Elle va par la suite se voir notifier son licenciement, puis saisir le conseil de prud’hommes aux fins, notamment, de solliciter un rappel de salaire, considérant que l’absence de précision dans ses avenants contractuels de la répartition de ses nouveaux horaires sur la semaine l’autorisait à revendiquer la requalification de son travail à temps partiel en un temps complet.

Ledit rappel de salaire a porté sur la période comprise entre le premier avenant contractuel irrégulier (car ne comprenant pas la répartition des heures sur la semaine) et son licenciement.

2. Les règles applicables

L’article L 3123-6 du Code du travail, résultant de la loi Travail (équivalent à l’ancien article L 3123-14 du même Code), précise que le contrat de travail du salarié à temps partiel doit mentionner, notamment :

  • la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d’aide à domicile et les salariés relevant d’un accord collectif de travail conclu en application de l’article L 3121-44 du même Code, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;
  • les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;
  • les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié ;
  • les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.

Il s’agit là, selon la loi précitée, de dispositions d’ordre public ne pouvant être modifiées de manière conventionnelle.

Par voie d’accord d’entreprise (qui prime sur ce point sur l’accord de branche), il est possible de définir la répartition des horaires de travail des salariés à temps partiel dans la journée de travail et, si cette répartition comporte plus d’une interruption d’activité ou une interruption supérieure à 2 heures, les amplitudes horaires pendant lesquelles ils peuvent exercer leur activité et des contreparties spécifiques (article L 3123-23 nouveau du Code du travail, résultant de la loi Travail).

En revanche, une convention ou un accord de branche étendu (qui prime sur l’accord d’entreprise sur ce point) reste nécessaire pour augmenter temporairement, par avenant au contrat de travail, la durée de travail des salariés à temps partiel (article L 3123-22 nouveau du Code du travail résultant de la loi Travail). Etant ici précisé que la convention ou l’accord de branche étendu doit déterminer le nombre maximal d’avenants au contrat de travail pouvant être conclus, dans la limite de huit par an et par salarié, en dehors des cas de remplacement d’un salarié absent nommément désigné.

Aux termes du dernier alinéa de l’article L 3123-6 précité, l’avenant au contrat de travail prévu à l’article L 3123-22 du Code du travail doit mentionner les modalités selon lesquelles des compléments d’heures peuvent être accomplis au-delà de la durée fixée par le contrat.

3. La requalification du temps partiel en un temps plein

Selon une décision qu’elle a rendue le 20 juin 2013 (n°10-20507), la Cour de cassation a jugé :

  • que dès lors que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, la durée mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et qu’il incombe à l’employeur, qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à sa disposition ;
  • que cette exigence légale d’un écrit s’applique non seulement au contrat initial mais aussi à ses avenants modificatifs de la durée du travail ou de sa répartition ;
  • qu’après avoir constaté qu’à partir du 1er septembre 2003 les bulletins de paie du salarié ne mentionnaient plus la durée contractuelle de travail de 43, 33 heures par mois, mais celle de 91 heures, sans qu’un avenant écrit mentionne la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, la Cour d’appel, appréciant souverainement la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a relevé que l’intéressé travaillait en réalité 151, 67 heures par mois ; qu’elle a ainsi fait ressortir que l’employeur ne rapportait pas la preuve qui lui incombait de la durée exacte de travail convenue.

Il en résulte que l’absence de contrat de travail écrit ou d’avenant au contrat de travail écrit précisant la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail ainsi que la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois emporte pour le salarié la présomption de ce qu’il se trouve en réalité juridiquement dans la situation d’un salarié travaillant à temps complet. Il appartient de son côté à l’employeur, en pareille situation, de rapporter la preuve de ce que le salarié a travaillé à due proportion de la durée exacte convenue avec le salarié, et que ledit salarié ne se trouvait pas dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler, et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à sa disposition.

L’employeur doit donc matérialiser par un document contractuel la nouvelle durée de travail ainsi que sa répartition sur la semaine, s’il ne souhaite pas s’exposer à un risque de requalification du temps partiel en un temps complet, avec les conséquences qui en résultent, notamment en matière de rappel de salaire.

4. Sur quelle période porte la requalification du temps partiel en un temps plein ?

Dans l’affaire tranchée par la Cour de cassation le 23 novembre 2016, la salariée, conformément aux dispositions de la convention collective applicable, qui prévoyaient la possibilité d’assurer le remplacement provisoire du supérieur hiérarchique, a régulièrement conclu avec son employeur des avenants à son contrat de travail initial, portant la durée du travail à 31 heures par semaine pour de courtes durées (trois à neuf jours de remplacement).

Les avenants en cause précisaient certes la nouvelle durée du travail provisoire de 31 heures. En revanche, ils ne contenaient pas d’indication sur la répartition de ces 31 heures entre les jours de la semaine ou entre les semaines du mois, contrairement à l’article L 3123-6 nouveau et à l’article L 3123-14 ancien du Code du travail.

La Cour d’appel, en raison de cette omission, a procédé à une requalification du temps partiel en un temps complet, mais pour les seules périodes correspondant à l’application des avenants.

Elle a justifié cette décision en retenant qu’au regard du caractère temporaire des avenants irréguliers, alors même que le contrat de travail du 7 décembre 1997 et l’avenant relatif à la promotion de l’intéressée en qualité de chef caissière portaient la mention de la répartition des heures de travail sur les semaines du mois conformément aux dispositions de l’article L 3123-14 du Code du travail, la requalification en temps plein ne pouvait concerner que les périodes correspondant aux avenants dits « faisant fonction », et non à l’ensemble de la période de la relation de travail à partir du premier contrat non conforme.

Cette solution paraissait intéressante. Pourtant, elle a été censurée par la Cour de cassation.

Pour cette dernière en effet, dès lors qu’elle a constaté que les conditions de la requalification étaient réunies à la date du premier avenant irrégulier du 2 août 2005, c’est à compter de cette dernière date que la requalification à temps complet devait s’opérer.

Elle a au préalable cru devoir rappeler expressément :

  • que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps plein ;
  • que cette exigence légale d’un écrit s’applique non seulement au contrat initial, mais aussi à ses avenants modificatifs de la durée du travail ou de sa répartition, fussent-ils temporaires et prévus par une convention collective ;
  • qu’à défaut, le contrat de travail à temps partiel doit, à compter de la première irrégularité, être requalifié en contrat de travail à temps plein.

On le voit, la prudence est de mise pour l’employeur, tant les enjeux financiers en cause, pour une simple négligence ou insuffisance contractuelle, peuvent être importants.

En cette matière, la rigueur contractuelle s’impose tout particulièrement.

Auteur

Rodolphe Olivier, avocat associé en droit social

 

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La modification de la durée de travail d’un salarié à temps partiel impose un avenant précisant la répartition des horaires – Article paru dans Les Echos Business le 14 décembre 2016