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De la nature des concessions réciproques fondant la validité d’un protocole transactionnel

De la nature des concessions réciproques fondant la validité d’un protocole transactionnel

Dans un arrêt du 5 juillet 2017, la Cour de cassation réaffirme que les concessions réciproques peuvent être indirectes.

En ce qu’elle éteint pour l’avenir entre les parties toute action en justice ayant le même objet (article 2052 du Code civil), les juges veillent à ce que les concessions réciproques soient réelles et non dérisoires, pour reconnaître à une transaction sa pleine portée. En effet, les juges conditionnent la validité de toute transaction à l’existence de concessions réciproques, alors que le Code civil ne mentionnait pas cette condition, jusqu’à une date récente cependant1.

Dans un arrêt rendu au début de l’été 2017, la Cour de cassation a eu à connaître du cas suivant : le dirigeant et associé majoritaire d’une société exploitant une concession automobile en proie à des difficultés financières avait obtenu l’ouverture d’une procédure de conciliation en avril 2007. Aux termes d’un accord homologué par le président du Tribunal de commerce et conclu le mois suivant, le dirigeant cédait, pour un euro symbolique, la totalité de sa participation au constructeur automobile propriétaire de la marque concédée. En contrepartie, l’acquéreur s’engageait à recapitaliser la société et à maintenir le dirigeant dans ses fonctions.

Le protocole stipulait que chacune des parties renonçait à toute action et instance judiciaire concernant les conditions d’exécution des contrats conclus entre elles pour toute cause née antérieurement à la signature du protocole, ces renonciations valant transaction en application des articles 2044 et suivants du Code civil.

Trois ans s’écoulèrent avant la révocation du dirigeant. Ce dernier soutint alors qu’il avait été contraint de céder ses actions pour un euro symbolique, alors que leur valeur était beaucoup plus élevée et ce, en raison de l’attitude anti-commerciale du constructeur et de l’absence de sortie de nouveau modèle pendant plusieurs années ; il demanda réparation pour le préjudice subi.

Les juges du fond, suivis par la Cour de cassation (Cass. com., 5 juillet 2017, n°15-22.220), ont relevé que le dirigeant avait un intérêt indirect à la signature du protocole transactionnel. En effet, la poursuite de l’activité de la société constituait un avantage pour le dirigeant : ce dernier évitait l’ouverture d’une procédure collective et était maintenu dans ses fonctions, continuant ainsi à percevoir une rémunération. En présence de concessions réciproques, fussent-elles indirectes, la transaction était valablement fondée et le dirigeant fut débouté de ses demandes.

Dans un arrêt de 20112, la Cour de cassation avait déjà admis que les concessions réciproques pouvaient n’être qu’indirectes.

Les praticiens se réjouiront de cette récente confirmation jurisprudentielle. Une interprétation large du champ d’application des concessions réciproques apporte une sécurité juridique aux protocoles transactionnels que l’on rencontre notamment en matière de cession à un euro, dès lors bien sûr que les autres conditions de validité (une contestation née ou à naître auquel le protocole transactionnel met fin ou prévient) sont remplies…

Notes

1 La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du 21e siècle a repris cette exigence prétorienne en l’ajoutant à la définition de la transaction figurant à l’article 2044 du Code civil.
2 En l’espèce, le cessionnaire de la totalité des actions d’une société avait renoncé à la garantie d’actif et de passif (à l’exception des réclamations fiscales et sociales) consentie par le cédant d’une société lors de la cession, et ce dernier avait consenti des abandons de créances importants au profit de la société cédée ; pour la cour, le cessionnaire profitait également et nécessairement des concessions financières consenties par le cédant à la cible (Cass. com., 25 octobre 2011, n°10-23.538, bull. IV, n°173).

 

Auteur

Isabelle Prodhomme, avocat en droit des sociétés, en droit boursier et en Private Equity.

 

De la nature des concessions réciproques fondant la validité d’un protocole transactionnel – Article paru dans La Lettre des Fusions-Acquisitions et du Private Equity, supplément n°1441 du magazine Option Finance du 11 décembre 2017

 

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