Non-respect d’engagements assortissant une autorisation de concentration
En octobre 2014, l’Autorité de la concurrence (ADLC) avait autorisé le groupe Altice/Numericable à prendre le contrôle exclusif de SFR. Pour remédier au risque de quasi-monopole qui aurait ainsi été conféré au groupe acquéreur dans le secteur de la téléphonie mobile dans l’Océan indien, cette autorisation avait été assortie de l’engagement d’Altice/Numéricable de céder les activités de téléphonie mobile d’Outremer Telecom (OMT) à la Réunion et à Mayotte. Cet engagement s’accompagnait de celui de préserver la viabilité économique, la valeur marchande et la compétitivité de ces activités jusqu’à leur cession, ce qui impliquait une absence d’immixtion dans la gestion de ces dernières.
Or, pendant cette période transitoire, alors que la stratégie commerciale d’OMT était jusque-là tournée vers la conquête de nouveaux clients par une politique de prix agressifs, des hausses tarifaires importantes (dépassant les 60 % pour la conquête de nouveaux clients) avaient été appliquées aux forfaits d’OMT. Dans le même temps, les concurrents de ce dernier, SRR et Orange, opéraient un repositionnement tarifaire à la baisse.
Après avoir relevé que ce changement de stratégie commerciale initié par Altice/Numericable, avait fait peser un risque important sur la compétitivité des offres d’OMT, non seulement, à l’égard des nouveaux clients, mais aussi, de ceux déjà en parc, l’ADLC a estimé qu’en agissant ainsi Altice/Numéricable avait méconnu des obligations fondamentales destinées à assurer l’effectivité de son engagement de cession des activités d’OMT.
L’ADLC a décidé d’infliger à Altice/Numericable une amende d’un montant de 15 millions d’euros tenant compte de que ce manquement avait été aggravé par le fait que les hausses de prix n’avaient pas été portées à sa connaissance et n’avaient été supprimées qu’après l’ouverture de la procédure de non-respect des engagements. Mais aussi de ce que Altice/Numericable s’était engagée à désigner un gestionnaire indépendant pour la période précédant la cession envisagée et savait que, dans l’attente de cette désignation, il lui était imposé de gérer les activités cédées comme l’aurait fait un tel gestionnaire.
ADLC, décision n°16-D-07 du 19 avril 2016 (aff. Altice/Numéricable)
Auteurs
Elisabeth Flaicher-Maneval, avocat Counsel au sein du département de doctrine juridique, CMS Bureau Francis Lefebvre Paris
Denis Redon, avocat associé en droit de la concurrence, CMS Bureau Francis Lefebvre Paris