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Plus de notation des titres de créances négociables émis par certains organismes de titrisation

L’article D. 213-3 du code monétaire et financier (CMF) dispose que les émetteurs de titres de créances négociables (à savoir, des billets de trésorerie et des bons à moyen terme négociables) (TCN) doivent rendre publique une notation de leur programme d’émission.

Ce principe est assorti de certaines exceptions, dont l’une qui bénéficie aux organismes de titrisation (OT) résulte du récent décret n°2014-361 du 20 mars 2014. Sous l’empire de cette nouvelle disposition, un OT peut être dispensé de faire noter les TCN qu’il émet s’il vérifie les deux conditions suivantes :

  • les titres de créances émis par l’OT doivent tous conférer des droits de même rang, ce qui exclut la subordination de certains titres de créances ; et
  • les TCN doivent être adossés à des créances éligibles de manière permanente au refinancement de l’Eurosystème (à l’exception du critère d’éligibilité lié au montant nominal minimal).

S’il s’agit d’un OT à compartiments, l’ensemble des compartiments doit satisfaire les critères visés ci-dessus et l’absence de subordination des titres de créances émis s’apprécie logiquement au sein de chaque compartiment.

Les créances éligibles auxquelles le décret fait référence consistent en des concours bancaires aux entreprises du secteur non financier, à des organismes du secteur public et des institutions internationales ou supranationales, ou en des créances hypothécaires sur des particuliers. Ainsi, le décret doit être compris comme destiné à favoriser le recours à la titrisation pour financer l’économie. C’est d’ailleurs vraisemblablement la raison pour laquelle le texte écarte les conditions imposées par les règles de l’Eurosystème en termes de montant nominal minimal : il ne s’agirait pas d’exclure du dispositif les prêts, parfois fort modestes, consentis aux PME/ETI dont on sait qu’elles font l’objet d’une attention toute particulière de la part des pouvoirs publics.

Le décret commenté, et il faut le regretter, laisse néanmoins planer une zone d’ombre : pour bénéficier de l’exemption, un OT doit figurer sur une liste arrêtée par le ministre chargé de l’économie, sur avis conforme de la Banque de France. Or, le décret étant silencieux quant aux conditions d’octroi ou de refus d’un tel avis, il est pour le moment difficile de savoir quelle sera la politique de la banque centrale française en la matière. D’ores et déjà, il apparaît que le futur OT dit « de place », destiné à offrir aux principales banques commerciales françaises un outil de refinancement des concours qu’elles apportent aux entreprises, devrait bénéficier du dispositif. Néanmoins, il serait souhaitable que des clarifications soient apportées pour donner le plus grand effet utile au texte.

Par ailleurs, chacun pourra apprécier l’opportunité de la méthode consistant à insérer dans le droit français des références directes à des normes élaborées par la Banque centrale européenne : bien que cela puisse a priori contribuer à une certaine harmonisation des notions utilisées, il n’est pas certain que les changements ultérieurs de ces règles au niveau européen prennent en compte les conséquences sur leur utilisation au niveau national.

Il n’en reste pas moins que ce décret confirme, si besoin était, que la titrisation est bel et bien de retour au service du financement de l’économie.

 

A propos des auteurs

Grégory Benteux, avocat associé, spécialisé dans les opérations de financements structurés et de titrisation, tant domestiques qu’internationales, portant sur tout type d’actifs : créances commerciales, infrastructures, créances publiques, prêts immobiliers, actifs corporels et incorporels. Il est également une référence en matière de covered bonds (société de crédit foncier, société de financement de l’habitat,structured covered bonds).

Alexandre Bordenave, avocat. Il conseille et assiste des établissements de crédit et des corporates à l’occasion d’opérations de financement, nationales ou internationales, portant sur tous types d’actifs. Il intervient plus particulièrement en matière de financements structurés.

 

Analyse juridique parue dans la revue Option Finance du 7 avril 2014