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L’ordonnance du 4 mai 2017 : une modernisation satisfaisante ?

L’ordonnance du 4 mai 2017 : une modernisation satisfaisante ?

Prise en application de la loi « Sapin II », l’ordonnance n°2017-747 du 4 mai 2017 « portant diverses mesures facilitant la prise de décision et participation des actionnaires au sein des sociétés » vise à la modernisation et à la simplification de la prise de décision des associés dans les sociétés anonymes (SA) et les sociétés à responsabilité limitée (SARL), tout en favorisant la participation des associés minoritaires. Quatre principales modifications ont été apportées.

1. Les associés minoritaires de SARL peuvent inscrire des projets de résolution aux assemblées générales : l’ordonnance a en effet ajouté un cinquième alinéa à l’article L. 223-27 du Code de commerce favorisant la participation des associés minoritaires de SARL. Désormais, dès lors qu’ils représentent au moins le vingtième des parts sociales, les associés ont la faculté de faire inscrire à l’ordre du jour des assemblées générales des points ou projets de résolution. L’ordonnance précise que toute clause contraire sera réputée non écrite. Cette disposition a vocation à donner une meilleure image de la protection des minorités notamment auprès d’investisseurs étrangers.

2. Les statuts peuvent prévoir le recours à la visioconférence ou aux moyens de télécommunication pour la tenue des AGO et AGE de SA non cotées : l’insertion d’un nouvel article L. 225-103-1 dans le Code de commerce concernant les SA non cotées est la plus révélatrice de la volonté de modernisation du droit des sociétés qui animait les auteurs de l’ordonnance. Le nouveau dispositif facilite la prise de décision en assemblées générales ordinaires et extraordinaires des actionnaires de sociétés anonymes dont les actions ne sont pas admises en négociation sur un marché réglementé ; en effet, l’ordonnance prévoit la faculté de stipuler dans les statuts le recours à la visioconférence ou à d’autres moyens de télécommunication permettant l’identification des actionnaires. Toutefois, les actionnaires représentant au moins 5% du capital peuvent s’opposer à ce qu’il soit recouru « exclusivement » à ce mode de consultation

3. Le régime des conventions réglementées dans les SASU est (enfin) simplifié et unifié : l’ordonnance simplifie le régime des conventions réglementées applicable dans les sociétés par actions simplifiées unipersonnelles (SASU) en complétant l’article L. 227-10 du Code de commerce. Dorénavant, les conventions conclues entre la SASU et son associé unique ou la société la contrôlant, si l’associé unique est une personne morale, ne sont plus soumises à l’obligation d’obtention d’un rapport spécial du commissaire aux comptes ; elles doivent à présent seulement être mentionnées au registre des décisions, au même titre que l’étaient déjà les conventions intervenues entre la SASU et ses dirigeants.

4. Les clauses d’agrément stipulées dans les statuts de SAS peuvent être introduites ou modifiées à une majorité autre que l’unanimité : la modification la plus significative réalisée par l’ordonnance consiste en une modernisation du mécanisme d’insertion ou de modification des clauses d’agrément dans les SAS. Auparavant, le régime d’adoption et de modification des clauses statutaires d’agrément dans les SAS, mentionnées à l’article L. 227-14, était similaire à celui des clauses d’inaliénabilité, d’exclusion et de changement de contrôle d’une société associé : l’adoption et la modification de l’ensemble de ces clauses nécessitaient l’unanimité des associés. Depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance, la clause statutaire d’agrément peut être insérée ou modifiée par une décision prise collectivement par les associés dans les conditions – de majorité notamment – et formes prévues par les statuts de la SAS. Cette nouvelle rédaction de l’article L. 227-19 privilégie la liberté statutaire, caractéristique de la SAS, permettant aux associés de conserver (ou non) la règle de l’unanimité pour introduire ou modifier une clause d’agrément dans les statuts de SAS.

Néanmoins, cette nouvelle disposition soulève une interrogation concernant son application dans le temps ; en effet, se pose la question des SAS déjà existantes dont les statuts ont pu être rédigés de manières variables, certains se contentant d’un renvoi à l’article L. 227-19, d’autres optant pour l’unanimité sans renvoi à l’article, et d’autres encore combinant un renvoi au dispositif légal (à présent amendé) et une exigence expresse d’unanimité. Une refonte des statuts est alors (si possible) à prévoir … en statuant à la majorité requise pour les modifications statutaires, voire à l’unanimité selon la rédaction des statuts d’origine. Une fois encore, et cette situation nous en donne une bonne illustration, la rédaction des statuts de SAS doit faire l’objet d’une vigilance extrême.

 

Auteur

Benoît Provost, avocat counsel, Corporate/Fusions & acquisitions.

 

L’ordonnance du 4 mai 2017 : une modernisation satisfaisante ? – Analyse juridique parue dans le magazine Option Finance le 18 septembre 2017