Parts sociales démembrées : l’imputation des déficits (fonciers) par l’usufruitier est confirmée

15 décembre 2017
L’article 8 du Code Général des Impôts (CGI) prévoit qu’en cas « de démembrement de la propriété de tout ou partie des parts sociales, l’usufruitier est soumis à l’impôt sur le revenu pour la quote-part correspondant aux droits dans les bénéfices que lui confère sa qualité d’usufruitier. Le nu-propriétaire n’est pas soumis à l’impôt sur le revenu à raison du résultat imposé au nom de l’usufruitier ».
Cependant l’administration considérait jusque-là (BOI-BIC-CHAMP-70-20-10-20-20120912 n°130), que l’usufruitier ne peut pas déduire d’éventuels déficits au motif que l’imputation reviendrait au nu-propriétaire.
Cette interprétation avait été approuvée par la Cour administrative d’appel de Bordeaux qui a jugé, le 15 mars 2016 (n°14BX01701), que le terme de « bénéfices » exclurait la prise en considération par un usufruitier des déficits.
Cette solution pouvait surprendre à la lecture de l’article 8 du CGI précité, le même terme de « bénéfices » étant utilisé pour l’usufruitier, comme pour l’associé de parts non démembrées.
Le renvoi par la Cour aux travaux parlementaires n’était pas davantage convaincant : le législateur souhaitait que l’usufruitier soit imposé sur les bénéfices sociaux au motif qu’il dispose du droit d’appréhender les bénéfices sociaux. Or, les éventuelles pertes – qui grèvent en principe les bénéfices qu’il peut percevoir – devraient être prises en compte de manière symétrique.
Une décision du Conseil d’État du 8 novembre dernier (n° 399764) vient, fort logiquement selon nous, infirmer la solution de la Cour et confirmer la solution selon laquelle « lorsque le résultat de cette société est déficitaire, l’usufruitier peut déduire de ses revenus la part du déficit correspondant à ses droits ».
Pour le rapporteur public Aurélie Bretonneau et dans un objectif de neutralité fiscale, cette décision s’explique notamment par le fait que la solution retenue par la Cour aurait institué « par un risque de déperdition systémique du droit à déduction, une distorsion de taille entre les sociétés dont la propriété est démembrée et les autres ».
La décision rendue par le Conseil d’État nous semble ainsi conforme à la réalité économique en matière de sociétés de personnes dont la propriété est démembrée.
Auteurs
Pierre Carcelero, avocat associé en droit fiscal
Charlotte Guincestre, avocat en fiscalité
Parts sociales démembrées : l’imputation des déficits (fonciers) par l’usufruitier est confirmée – L’actualité fiscale en bref parue dans le magazine Option Finance le 27 novembre 2017
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