Prêts entre particuliers : attention au risque de requalification
Prêts et donations sont des moyens bien connus, mais très différents, pour aider un proche.
Les prêts ont vocation à être remboursés, contrairement aux donations, qui emportent la dépossession définitive du donateur et l’enrichissement immédiat du donataire. Fiscalement, une donation :
- est soumise aux droits de mutation à titre gratuit ;
- réduit le patrimoine taxable à l’ISF de la personne qui la consent et augmente celui du bénéficiaire.
Pour réviser à la hausse l’ISF d’un emprunteur, la Cour de cassation a reconnu le 8 février 2017 qu’un prêt peut être requalifié en donation déguisée par l’administration.
Une mère âgée avait consenti à son fils six prêts non rémunérés et sans garantie, qui s’étaient succédé entre 1989 et 2003 sans aucun remboursement. Néanmoins, l’emprunteur avait régulièrement porté ces emprunts au passif de son ISF.
La Cour a validé la requalification sur la base du délai de prescription allongé (6 ans) et de la procédure pour abus de droit, avec la pénalité corrélative de 80%.
Pris isolément, les indices retenus à charge ne devraient normalement pas suffire à requalifier le prêt en libéralité. Cependant, leur conjonction et surtout l’âge de la prêteuse semblent avoir été déterminants pour la Cour : le terme du premier prêt correspondait pour elle à un âge de 99 ans « rendant aléatoire l’obligation de remboursement » .
Affirmation au demeurant étonnante, puisque le décès d’un prêteur n’éteint pas la dette de l’emprunteur.
A retenir
La Cour de cassation juge qu’un abus de droit peut être retenu à l’encontre de prêts familiaux réalisant des donations « déguisées », notamment lorsque les circonstances montrent que le prêteur n’attend pas de remboursement.
Auteur
Florent Ruault, avocat, spécialiste des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale