Image Image Image Image Image Image Image Image Image Image
Scroll to top

Haut

Publicité : l’instauration de mesures de transparence sur les Adexchange

Publicité : l’instauration de mesures de transparence sur les Adexchange

Le secteur de la publicité a longtemps été caractérisé par une certaine opacité qui constituait un frein à l’allocation des ressources financières. La loi n°93-122 du 29 janvier 1993, dite « loi Sapin », est venue instaurer des obligations de transparence.
Avec l’avènement d’Internet, des modes de commercialisation d’espaces publicitaires de plus en plus innovants se sont développés, faisant apparaître de nouveaux acteurs. Or, en raison même de son ancienneté, la loi Sapin ne se préoccupait pas du secteur de la publicité digitale, et contenait des dispositions qui apparaissaient inapplicables aux nouveaux médias.

Afin d’intégrer ces nouveaux médias, l’article 131 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015, dite « loi Macron », a ajouté la précision à l’article 20 de la loi Sapin que l’obligation de mandat entre l’agence et l’annonceur s’applique à « quelque support que ce soit ».

Cet article 131 prévoyait en outre que les modalités d’application des obligations de compte rendu prévues à l’article 23 de la loi Sapin, pour les prestataires dans le secteur de la publicité digitale, seraient précisées par décret en Conseil d’Etat. Tel est l’objet du décret n°2017-159 du 9 février 2017 relatif aux prestations de publicité digitale.

L’article 23 de la loi Sapin indique en effet que le vendeur d’espace publicitaire doit rendre compte à l’annonceur, dans le mois qui suit la diffusion du message publicitaire, des conditions dans lesquelles les prestations ont été effectuées.

Or, le succès croissant des plates-formes d’Adexchange combiné – entre autres – à l’utilisation des technologies de RTB (Real Time Bidding), des DSP (Demand Side platform – utilisées côté annonceurs, agences et leurs trading desks) et SSP (Sell Side Platform – utilisées côté vendeurs d’espaces publicitaires et régies) venait perturber l’application de la loi Sapin qui, elle, ne connaissait que les statuts de support, régie, annonceur et agence.

L’incertitude quant à la qualification des opérateurs au regard de ces statuts conduisait ainsi à une application variable de l’article 23 de la loi Sapin et donc à une certaine opacité quant aux informations dont pouvait disposer l’annonceur sur sa campagne publicitaire.

Le décret impose en premier lieu des obligations générales d’information pour les prestations publicitaires « ayant pour objet la diffusion de messages sur tous supports connectés à Internet tels qu’ordinateurs, tablettes, téléphones mobiles, téléviseurs et panneaux numériques » sur :

  • la date de diffusion des annonces ;
  • les emplacements de diffusion des annonces ;
  • le prix global de la campagne ;
  • le prix unitaire des espaces publicitaires facturés.

Mais l’apport le plus notable concerne les obligations portant sur les « campagnes qui s’appuient sur des méthodes d’achat de prestations en temps réel sur des espaces non garantis, notamment par des mécanismes d’enchères, pour lesquelles les critères déterminants de l’achat sont le profil de l’internaute et l’optimisation de la performance du message ». Le décret s’applique donc aux achats programmatiques d’espaces publicitaires sur les plates-formes d’Adexchange utilisant des technologies de RTB.

Les vendeurs d’espace publicitaire seront donc amenés à fournir, par l’intermédiaire de leurs régies, les informations suivantes aux annonceurs :

Finalité de la fourniture des informationsInformation fournie
Justifier de l’exécution des prestationsL’univers de diffusion publicitaire, c’est-à-dire les sites Internet sur lesquels les publicités sont diffusées
Le contenu des messages publicitaires
Les formats utilisés
Le résultat des prestations au regard des indicateurs de performance convenus, tels que le nombre d’affichages réalisés, le nombre d’interactions intervenues entre l’internaute et les affichages publicitaires ou toute autre unité de mesure appropriée
Le montant global facturé
Attester de la qualité des prestationsLes outils technologiques, compétences techniques et prestataires engagés
Une identification des acteurs de conseil, distincts des prestataires de technologie numérique
Les résultats obtenus en fonction des objectifs fixés
Protéger l’image de la marque de l’annonceurL’informer sur les mesures mises en œuvre pour éviter que ses messages publicitaires soient diffusés sur des supports illicites ou préjudiciables à l’image de l’annonceur
S’il en existeLes engagements souscrits dans le cadre de chartes de bonnes pratiques

Les vendeurs d’espaces publicitaires établis dans un autre Etat membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen ne seront toutefois pas concernés, dès lors qu’ils sont soumis à des obligations équivalentes en matière de compte rendu, la loi Sapin constituant une exception française.

Les nouvelles obligations s’imposeront à compter du 1er janvier 2018. Les entreprises proposant des services de publicité digitale doivent donc dès à présent mettre en place des mécanismes permettant de transmettre ces informations à l’annonceur, vaste chantier qui nécessitera la coopération de l’ensemble de la chaîne de valeur.

 

Auteurs

Anne-Laure Villedieu, avocat associée en droit de la propriété industrielle, droit de l’informatique, des communications électroniques et protection des données personnelles.

Thomas Livenais, avocat en droit de la propriété intellectuelle