Règlement extrajudiciaire des litiges de consommation
Un an après l’introduction de l’action de groupe en France, notre arsenal juridique s’enrichit encore d’un nouveau dispositif de règlement des litiges de consommation.
Dans le cadre de la transposition de la directive 2013/11/UE du 21 mai 2013 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation, l’ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015, complétée par le décret n° 2015-1382 du 30 octobre 2015, met en place un dispositif tendant à favoriser le recours des consommateurs à un mode de résolution amiable des litiges les opposant à des professionnels.
Ce nouveau dispositif, inséré aux articles L.151-1 et suivants et R.152-1 et suivants du Code de la consommation, s’applique aux litiges nationaux ou transfrontaliers portant sur l’exécution de contrats de vente de marchandises ou de fourniture de services opposant consommateurs et professionnels (art. L.151-2). En sont notamment exclus, outre les litiges entre professionnels, les réclamations portées par le consommateur auprès du service clientèle du professionnel, les négociations directes entre le consommateur et le professionnel, les tentatives de conciliation ou de médiation ordonnées par un tribunal saisi du litige ainsi que les procédures introduites par un professionnel contre un consommateur (art. L.151-3).
Le recours à ce mode de résolution du litige présente les caractéristiques d’être gratuit et confidentiel mais aussi d’être volontaire, la médiation ne pouvant pas être imposée : il est en effet interdit de prévoir une clause ou une convention obligeant le consommateur à recourir à une médiation préalablement à la saisine du juge.
En revanche un litige ne pourra pas être examiné par le médiateur si « le consommateur ne justifie pas avoir tenté, au préalable, de résoudre son litige directement auprès du professionnel par une réclamation écrite selon les modalités prévues, le cas échéant, dans le contrat » ou lorsque « le litige a été précédemment examiné ou est en cours d’examen par un autre médiateur ou par un tribunal » (art. L.152-2).
Le décret du 30 octobre 2015 précise les modalités de mise en œuvre du processus de médiation tout en rappelant que les parties peuvent se retirer de la médiation à tout moment (art. R.152-2), qu’elles sont libres d’accepter ou de refuser la proposition de solution du médiateur et que la participation à la médiation n’exclut pas la possibilité d’un recours devant une juridiction (art. R.152-4). L’issue de la médiation intervient au plus tard dans un délai de 90 jours à compter de la saisine du médiateur, sauf décision de celui-ci de prolonger ce délai, en cas de litige complexe (art. R.152-5).
Les médiateurs, qui pourront le cas échéant être employés ou rémunérés exclusivement par le professionnel, devront présenter certaines qualités pour être inscrits sur la liste notifiée à la Commission européenne (cf. art. R.154-1 et s.) ; ils seront par ailleurs évalués par la Commission d’évaluation et de contrôle de la consommation créée auprès du ministre de l’Economie (art. R.155-1 et s.). Ils devront proposer, sur un site Internet dédié, un accès direct aux informations relatives à la procédure de médiation et permettre au consommateur de déposer une demande en ligne accompagnée des documents justificatifs, tout en lui fournissant un lien électronique avec la plateforme européenne de résolution en ligne des litiges (art. L.153-1 et s. et art. R.153-1). La Commission d’évaluation mettra en ligne sur son site Internet la liste actualisée des médiateurs (art. R.155-5).
De leur côté, les professionnels doivent, d’ici le 1er janvier 2016, garantir au consommateur un recours effectif à ce dispositif. Pour cela, ils disposent d’une alternative : soit mettre en place eux-mêmes un système de médiation de la consommation ; soit proposer au consommateur d’accéder à tout autre médiateur de la consommation qualifié, étant souligné qu’ils devront toujours lui permettre d’accéder au médiateur compétent pour le domaine d’activité économique dont ils relèvent, s’il en existe un (art. L.152-1).
Concrètement, le professionnel sera tenu d’informer le consommateur en lui communiquant les coordonnées du ou des médiateurs compétents, y compris lorsqu’un litige n’aura pu être réglé dans le cadre d’une réclamation préalable auprès de ses services (art. L.156-1). Les informations utiles aux consommateurs devront figurer de manière visible et lisible sur le site Internet du professionnel, sur ses conditions générales de vente ou de service, sur ses bons de commandes ou sur tout autre support adapté (art. R.156-1). S’il exerce une activité de commerce électronique, le professionnel devra mettre en place une procédure de résolution en ligne des litiges de consommation, conformément au règlement UE n°524/2013 du 21 mai 2013, et en informer le consommateur (art. L.156-2). Tout manquement à ces obligations sera passible d’une amende administrative pouvant atteindre 3 000 € pour les personnes physiques et 15 000 € pour les personnes morales (art. L.156-3).
Soulignons que, en cas de litige transfrontalier, le consommateur bénéficiera de l’assistance et des informations nécessaires pour être orienté vers l’entité de règlement extrajudiciaire des litiges de consommation compétente dans un autre Etat membre (art. L.156-4 et art. R.156-2).
Le projet de loi de ratification de cette ordonnance a été déposé devant le Sénat le 28 octobre 2015.
Auteurs
Nathalie Pétrignet, avocat associée, spécialisée en matière de droit de concurrence national et européen, pratiques restrictives et négociation commerciale politique de distribution et aussi en droit des promotions des ventes et publicité.
Elisabeth Flaicher-Maneval, avocat Counsel au sein du département de doctrine juridique.