Rejet d’une QPC sur le décret obligeant les fournisseurs d’accès à Internet à distinguer le câble et la fibre dans leurs messages publicitaires
11 juillet 2017
Les sociétés NC Numericable et SFR avaient demandé au Conseil d’État, à l’appui de leur requête tendant à l’annulation de l’arrêté du 1er mars 2016 portant modification de l’arrêté du 3 décembre 2013 relatif à l’information préalable du consommateur sur les caractéristiques techniques des offres d’accès à l’Internet en situation fixe filaire, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité des dispositions du premier alinéa de l’article L.113-3 du Code de la consommation dans leur version issue de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation.
Cet article, dont les dispositions figurent aujourd’hui à l’article L.112-1 du Code de la consommation, prévoit que « tout vendeur de produit ou tout prestataire de services informe le consommateur, par voie de marquage, d’étiquetage, d’affichage ou par tout autre procédé approprié, sur les prix et les conditions particulières de la vente et de l’exécution des services, selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l’Économie, après consultation du Conseil national de la consommation ».
Pour les sociétés requérantes, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence en renvoyant au pouvoir réglementaire la définition des conditions dans lesquelles les vendeurs et prestataires de services doivent remplir leur obligation d’information à l’égard des consommateurs et ainsi affecté, tout à la fois, la liberté d’entreprendre qui découle de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et la liberté de communication garantie par l’article 11 de cette même Déclaration.
Le Conseil d’Etat a rejeté les requêtes sur le fondement des dispositions de l’article 34 de la Constitution selon lesquelles « la loi détermine les principes fondamentaux […] des obligations civiles et commerciales » en jugeant que le législateur a prévu une obligation d’information des consommateurs à la charge des vendeurs de produits ou des prestataires de services sur les prix et les conditions particulières de la vente et de l’exécution des services, de sorte qu’il pouvait, sans méconnaître l’étendue de sa compétence, renvoyer au ministre chargé de l’Economie le soin de fixer les modalités particulières de cette information (CE, 3 mars 2017, n°398822, NC Numéricable et SFR).
En outre, la question soulevée par les sociétés SFR et Numéricable, qui n’est par ailleurs pas nouvelle, ne présentait pas de caractère sérieux et ne méritait donc pas d’être communiquée au Conseil constitutionnel.
Il convient désormais d’attendre la décision du Conseil d’État sur la légalité de l’arrêté du 1er mars 2016 encadrant l’utilisation du mot « fibre » dans les messages publicitaires et les documents commerciaux des fournisseurs d’accès à Internet. On rappellera notamment que ce texte prévoit:
- l’obligation de délivrer au consommateur une information sur le support physique de la ligne, les débits et les services disponibles (notamment les services de télévision) ;
- l’obligation de mettre à disposition du public, à travers un espace pédagogique en ligne, une information détaillant l’ensemble des caractéristiques techniques de l’offre, y compris les conditions et limitations d’usage des services souscrits ;
- l’obligation d’apposer des mentions légales sur les supports publicitaires et commerciaux des opérateurs lorsqu’il est fait référence au débit d’une offre qui « varie significativement en fonction des caractéristiques du raccordement au réseau fixe ouvert au public », c’est-à -dire d’une offre xDSL (ADSL ou VDSL). Ces mentions précises sont relatives, notamment, à l’atténuation du débit en fonction de la longueur de la ligne du consommateur.
Cette dernière obligation ne portait, avant l’adoption de l’arrêté contesté, que sur les offres d’accès à Internet supportées par les réseaux « cuivre », à l’exclusion des offres reposant sur les réseaux câblés (appartenant principalement à Numéricable et Bouygues Telecom) : le pouvoir réglementaire et le régulateur ont estimé que cette réglementation risquait de biaiser l’exercice d’une concurrence loyale entre les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et, in fine, le choix du consommateur (cf. Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, avis n°2013-1168 du 10 octobre 2013).
Auteur
Audrey Maurel, avocat, Droit des communications électroniques
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