Représentant syndical au CSE : pas de désignation dans les entreprises de moins de 50 salariés

26 octobre 2021
Il résulte des dispositions du Code du travail qu’un représentant syndical au comité social et économique (CSE) peut être désigné par les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise. Sa mission est alors de représenter son organisation au sein du comité où il siège avec voix consultative. Ses modalités de désignation diffèrent selon que l’effectif de l’entreprise est inférieur ou égal à 300 salariés.
Dans un arrêt rendu le 8 septembre 2021 (n° 20-13.694), la Cour de cassation se prononce pour la première fois sur la possibilité de désigner un représentant syndical au CSE dans une entreprise de moins de 50 salariés.
La désignation d’un représentant syndical au CSE distinct du délégué syndical n’est possible que dans les entreprises d’au moins 300 salariés
Aux termes de l’article L. 2314-2 du Code du travail, le représentant syndical au CSE est désigné parmi les membres du personnel remplissant les conditions d’éligibilité au CSE dans les entreprises d’au moins 300 salariés. Dans les entreprises dont l’effectif est inférieur à ce seuil, le délégué syndical est de droit représentant syndical au CSE (c. trav. art. L. 2143-22).
Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 8 septembre 2021, un syndicat a été reconnu représentatif à la suite d’élections professionnelles intervenues dans une entreprise de moins de 50 salariés. Le syndicat n’a pas désigné de délégué syndical au CSE, mais il a désigné un candidat non élu en qualité de représentant syndical au comité social et économique mis en place.
L‘employeur a alors saisi le Tribunal judiciaire d’une demande d’annulation de cette désignation. Pour rejeter cette demande, le Tribunal judiciaire retient que « dès lors qu’un syndicat représentatif n’a pas désigné de délégué syndical, tout salarié éligible au comité social et économique peut être désigné en qualité de représentant syndical auprès de ce comité ». En l’espèce, le tribunal a retenu que : « le syndicat n’a désigné aucun élu comme délégué syndical et la salariée élue aux dernières élections ne peut siéger comme représentant syndical auprès du CSE en vertu de la règle de non-cumul ».
Ce jugement faisait écho aux motifs d’un arrêt relativement ancien de la Cour de cassation, lequel avait rappelé que, s’il résulte de la loi (article L. 412-17 du Code du travail alors en vigueur, devenu c. trav. art. L. 2143-22) que dans une entreprise de moins de 300 salariés le délégué syndical est de droit le représentant syndical au CSE, ce qui interdit à une organisation syndicale de désigner un représentant syndical distinct du délégué syndical, la loi n’interdit pas la désignation d’un représentant syndical au comité parmi les salariés éligibles dans l’hypothèse où aucun délégué syndical n’aurait été désigné (Cass. soc., 1er avril 1998, n° 96-60.442).
La Cour de cassation ne suit pas le raisonnement des juges du fond et annule la désignation du candidat non élu en tant que représentant syndical au CSE au motif que le législateur n’a prévu la possibilité de désigner un représentant syndical au CSE distinct du délégué syndical que dans les entreprises d’au moins 300 salariés.
Compte tenu des circonstances de l’espèce qui concernait une entreprise de moins de 50 salariés, il ne semble pas que cette jurisprudence remette en cause la solution apportée par l’arrêt de 1998 permettant à une entreprise de moins de 300 salariés – mais de plus de 50 – de désigner un représentant syndical au CSE parmi les candidats non élus lorsqu’aucun délégué syndical n’a été désigné.
La désignation d’un représentant syndical au CSE est impossible dans les entreprises de moins de 50 salariés
Sous l’empire des dispositions antérieures aux ordonnances de 2017, la question de la possible désignation d’un représentant syndical au comité d’entreprise dans les entreprises de moins de 50 salariés ne se posait pas dès lors que le comité d’entreprise n’avait vocation à être mis en place que dans les entreprises d’au moins 50 salariés.
Désormais, même si ses attributions sont différentes selon que l’effectif de l’entreprise atteint ou non 50 salariés, toutes les entreprises d’au moins 11 salariés ont vocation à être dotées d’un CSE. Or, les dispositions relatives à la désignation d’un représentant syndical au CSE – qui n’ont pas été modifiées par les ordonnances de 2017 – distinguent seulement, s’agissant de ses modalités de désignation, selon que l’effectif de l’entreprise est inférieur ou au moins égal à 300 salariés.
Dès lors, la question se pose de savoir si un syndicat représentatif peut désigner un représentant syndical au CSE dans une entreprise de moins de 50 salariés.
La Cour de cassation répond clairement à cette question par la négative. Elle décide en effet qu’il résulte de l’application combinée des articles L. 2314-2, L. 2143-3, L. 2143-6 et L. 2143-22 du Code du travail : « que le législateur n’a prévu la possibilité de désigner un représentant syndical au comité social et économique distinct du délégué syndical que dans les entreprises de plus de trois cents salariés et que, dans les entreprises de moins de cinquante salariés dans lesquelles la désignation d’un délégué syndical en application des dispositions de droit commun de l’article L. 2143-3 du Code du travail est exclue, les dispositions de l’article L. 2143-22 ne sont pas applicables.»
La Cour poursuit en ajoutant que : « la désignation dérogatoire, maintenue par le législateur, d’un membre de l’institution représentative du personnel prévue dans les entreprises de moins de cinquante salariés comme délégué syndical, sans crédit d’heures de délégation supplémentaire, en application des dispositions de l’article L. 2143-6 du même code, n’a pas pour conséquence de rendre applicable la possibilité de désigner un représentant syndical auprès du comité social et économique des entreprises de moins de cinquante salariés. »
La Cour de cassation prend donc également explicitement – et pédagogiquement – position sur l’impossibilité de désigner un représentant syndical au CSE dans les entreprises de moins de 50 salariés où peut être désigné un délégué syndical : une telle désignation ne rentre pas dans les prévisions de la loi.
Cette solution peut paraitre de prime abord discutable à la lecture des textes visés, qu’il s’agisse d’une part de l’article L. 2143-6 du Code du travail organisant expressément la possibilité de désigner un délégué syndical parmi les élus du CSE dans les entreprises de moins de 50 salariés, et d’autre part de l’article L. 2143-22 du Code du travail prévoyant que le délégué syndical est de droit représentant syndical au CSE dans les entreprises de moins de 300 salariés. En effet, il ne semble pas en résulter une impossibilité de désigner un représentant syndical au CSE dans les entreprises de moins de 50 salariés.
Cette solution paraît cependant frappée au coin du bon sens. En effet, comme le rappelle la Cour, le délégué syndical désigné dans les entreprises de moins de 50 salariés selon les conditions dérogatoires de l’article L.2143-6 du code du travail ne dispose pas d’un crédit d’heures supplémentaires, ce qui rend impossible légalement et en pratique l’exercice d’un mandat de représentant syndical au CSE.
L’exercice d’un mandat de représentant syndical au CSE, en plus ceux de délégué syndical également élu au CSE dans les entreprises de moins de 50 salariés, se heurterait par ailleurs à la position de principe de la Cour de cassation postulant une incompatibilité par nature des mandats d’élu et de représentant syndical au CSE :
« (…) un salarié ne peut siéger simultanément dans le même comité social et économique en qualité à la fois de membre élu, titulaire ou suppléant, et de représentant syndical auprès de celui-ci, dès lors qu’il ne peut, au sein d’une même instance et dans le même temps, exercer les fonctions délibératives qui sont les siennes en sa qualité d’élu et les fonctions consultatives liées à son mandat de représentant syndical lorsqu’il est désigné par une organisation syndicale » (Cass. soc., 11 septembre 2019, n°18-23.764 ; Cass. soc., 22 janvier 2020, n°19-13.269).
La désignation d’un représentant syndical au CSE est donc exclue dans les entreprises de moins de 50 salariés.
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