La révision du cadre européen des télécommunications
Plus de vingt ans après le premier « paquet télécom » relatif à la libéralisation du marché des télécommunications et à l’accès aux réseaux des anciens monopoles nationaux, la Commission européenne a annoncé une révision ambitieuse de la réglementation européenne en matière de communications électroniques (communiqué IP/16/3008 du 14 septembre 2016).
Cette réforme répond à trois objectifs stratégiques de connectivité pour 2025 :
- la mise à disposition de connexions gigabit à très haut débit (permettant aux utilisateurs d’envoyer et de recevoir un gigabit de données par seconde) pour tous les principaux moteurs socio-économiques, écoles, universités, centres de recherche, plates-formes de transport, prestataires de services publics qui dépendent des technologies numériques ;
- l’accès à une connexion offrant une vitesse de téléchargement d’au moins 100 Mb/s pouvant être convertie en une connexion gigabit à tous les foyers européens, ruraux ou urbains ;
- une couverture 5G ininterrompue pour toutes les zones urbaines ainsi que les principaux axes routiers et ferroviaires.
Le Code européen des communications électroniques que la Commission présente aujourd’hui propose :
- une concurrence accrue et des investissements plus prévisibles : il faut un environnement réglementaire stable qui réduit les divergences entre les pratiques réglementaires au sein de l’Union européenne. L’accès aux réseaux appartenant aux « opérateurs disposant d’une puissance significative sur le marché » demeure un élément important du nouveau code. Cependant, les conditions dans lesquelles l’accès est accordé sont simplifiées et adaptées pour stimuler le déploiement de nouveaux réseaux de haute capacité. La Commission propose en outre une approche plus ciblée et ne prévoit des obligations d’accès que si cela est nécessaire pour remédier aux insuffisances du marché. Ainsi, le nouveau code diminuera nettement le degré de réglementation lorsque des opérateurs concurrents co-investissent dans des réseaux à très haut débit et facilitera la participation des plus petits acteurs aux projets d’investissement en leur permettant de mutualiser les coûts et de surmonter les barrières à l’entrée du marché ;
- une meilleure utilisation des fréquences radio : il est particulièrement important de réduire les divergences entre les pratiques réglementaires au sein de l’Union dans le domaine du spectre radioélectrique, véritable « matière première » des communications sans fil. Le code propose ainsi d’accorder des licences de longue durée, assorties d’exigences plus rigoureuses d’utilisation effective et efficiente du spectre. Il propose également de coordonner certains paramètres de base tels que le calendrier des assignations, afin que le spectre soit mis sur le marché au moment adéquat, et de faire converger les politiques nationales pour offrir une couverture complète de l’ensemble de l’UE ;
- une meilleure protection des consommateurs dans les domaines où, du fait des spécificités sectorielles, les règles générales en matière de protection des consommateurs sont insuffisantes. Des règles actualisées faciliteraient le changement de fournisseur lorsque le consommateur s’est abonné à un pack (combinant Internet, téléphone, télévision, téléphonie mobile, etc.) et garantiraient que les groupes vulnérables (personnes âgées, personnes handicapées, bénéficiaires d’aides sociales, etc.) ont droit à des contrats Internet à un prix abordable ;
- un environnement en ligne plus sûr pour les utilisateurs et des règles plus équitables pour tous les acteurs : certaines règles seraient étendues aux nouveaux acteurs en ligne qui offrent des services équivalents à ceux des opérateurs traditionnels, afin que les exigences en matière de sécurité (visant à assurer la sécurité des réseaux et des serveurs) leur soient aussi applicables. Il est également envisagé, pour l’avenir, la possibilité pour les utilisateurs de joindre gratuitement le numéro d’urgence européen 112 par l’intermédiaire de ces services en ligne.
La concurrence reste donc au cÅ“ur de l’approche de la Commission. Elle serait le meilleur moyen de stimuler l’innovation et d’apporter un maximum d’avantages pour les consommateurs. Ces initiatives permettraient de répondre aux besoins grandissants de connectivité des européens, d’accroître la compétitivité européenne en encourageant l’investissement dans des réseaux à très haut débit et d’accélérer la mise à disposition d’un accès public au wi-fi pour tous les citoyens.
Enfin, la Commission propose également de renforcer le rôle des organismes nationaux de régulation et de charger l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) d’assurer l’application cohérente et prévisible des règles dans l’ensemble du marché unique du numérique en limitant la fragmentation et les incohérences.
Les propositions législatives de la Commission vont désormais être examinées en détail par le Parlement et le Conseil de l’Union européenne. L’ambition de la Commission est de voir ces textes adoptés d’ici la fin de l’année 2017 pour une transposition dans les Etats membres avant 2020.
Auteur
Audrey Maurel, avocat, Droit des communications électroniques