Sécurité sociale : quelles perspectives pour 2025 ?
20 décembre 2024
Le projet de loi spéciale visant à garantir la «continuité nationale» et «le fonctionnement des services publics», en permettant notamment le prélèvement des impôts, a été définitivement adopté le 18 décembre 2024 et sera publié dans les prochains jours.
Ce texte comporte trois articles consacrés à la levée des impôts, à l’autorisation d’endettement par l’Agence France Trésor et au plafond d’endettement des caisses de Sécurité sociale (Acoss) pour que cette dernière puisse continuer à emprunter sur les marchés.
Une fois la loi promulguée, le nouveau gouvernement devra publier un décret avant le 31 décembre, ouvrant les dépenses sur la base du budget de l’année 2024. Le Conseil d’État a en effet confirmé, dans un avis remis au gouvernement le 9 décembre 2024, que la loi spéciale ne peut contenir de nouvelles dispositions fiscales, en particulier l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu.
Au début de l’année 2025, le gouvernement nouvellement nommé devrait présenter au Parlement, de nouveaux projets de textes budgétaires. Une loi de financement de la sécurité sociale devrait donc finalement être adoptée pour l’année 2025.
A ce jour, certaines dispositions qui n’ont pas été reconduites pour 2025 prennent fin au 31 décembre 2024 et l’incertitude demeure sur les mesures qui seraient susceptibles de figurer dans un futur PLFSS. Celui-ci pourrait néanmoins s’inspirer des propositions qui figuraient dans le projet de loi rejeté par l’Assemblée nationale avec le vote de la motion de censure.
Mesures prenant fin au 31 décembre 2024
Un certain nombre de dispositifs temporaires devraient prendre fin au 31 décembre 2024, faute de reconduction par la loi en 2025. Sont principalement visés :
Remboursement des frais de trajets domicile -lieu de travail
La loi de finances rectificative pour 2022 et la loi de finances pour 2024 avaient relevé temporairement les plafonds d’exonération de cotisations et de contributions sociales des remboursements et prises en charge par les employeurs au titre des frais professionnels de déplacement entre le domicile et le lieu de travail. Ces plafonds majorés cessent de s’appliquer au 31 décembre 2024.
A compter du 1er janvier 2025 :
⇒ La prime de transport, versée aux salariés qui sont contraints d’utiliser leur véhicule personnel pour se rendre sur leur lieu de travail, est exonérée à hauteur de 300 euros par an et par salarié pour les frais de carburant et de 600 euros par an et par salarié pour les frais d’alimentation d’un véhicule électrique, hybride rechargeable ou à hydrogène. Jusqu’au 31 décembre 2024, cette prime pouvait être versée aux salariés qui utilisaient leur véhicule personnel sans condition particulière et les seuils d’exonération étaient respectivement fixés à 400 euros et 700 euros ;
⇒ La prise en charge des frais engagés par le salarié dans le cadre du forfait mobilités durables est exonérée dans la limite de 600 euros contre 700 euros précédemment ;
⇒ Les frais d’abonnement de transport en commun ou de service public de location de vélo sont exonérés à hauteur du montant de prise en charge obligatoire de 50%. La prise en charge facultative à hauteur de 75% du coût de l’abonnement n’est donc plus exonérée d’impôt sur le revenu ni de cotisations.
Il appartiendra au nouveau gouvernement d’indiquer s’il entend prolonger ces mesures en 2025.
Mise à disposition d’un véhicule électrique
L’arrêté du 10 décembre 2002 modifié indique que jusqu’au 31 décembre 2024, en cas de mise à disposition d’un véhicule fonctionnant exclusivement au moyen de l’énergie électrique, l’évaluation de l’avantage en nature ne tient pas compte des frais d’électricité engagés par l’employeur pour la recharge du véhicule et est calculée après application d’un abattement de 50 % dans la limite de 1 964,90 euros par an. A compter du 1er janvier 2025, les frais d’électricité devront être pris en compte pour l’évaluation de l’avantage en nature.
Mise à disposition d’une borne de recharge
Par ailleurs, l’arrêté du 10 décembre 2002 modifié prévoit que, en cas de mise à disposition par l’employeur sur le lieu de travail d’une borne de recharge de véhicules fonctionnant au moyen de l’énergie électrique, l’avantage en nature résultant de l’utilisation de cette borne par le salarié à des fins non professionnelles est négligé, y compris pour les véhicules appartenant aux salariés.
De plus, il est également prévu que, pour les bornes de recharge de véhicules fonctionnant au moyen de l’énergie électrique installées en-dehors du lieu de travail, l’avantage en nature résultant de la prise en charge par l’employeur de tout ou partie des frais relatifs à l’achat et à l’installation d’une borne de recharge est négligé si cette borne est restituée à la fin du contrat de travail. Dans le cas contraire, les frais engagés sont exclus de l’assiette des cotisations dans la limite de 50% des dépenses réelles.
Ces deux mesures prennent également fin le 31 décembre 2024.
Une nouvelle modification de l’arrêté ministériel du 10 décembre 2002 relatif à l’évaluation des avantages en nature, pourraient éventuellement rétablir ces mesures en 2025.
Utilisation des titres-restaurant
Mise en place par la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, cette mesure permet jusqu’au 31 décembre 2024, d’utiliser les titres-restaurant pour acquitter en tout ou en partie le prix de tout produit alimentaire, qu’il soit ou non directement consommable.
A compter du 1er janvier 2025, les titres restaurant ne pourront donc plus être utilisés que pour acheter des repas ou des préparations alimentaires directement consommables, ou des fruits et légumes.
Lors d’une conférence des présidents qui s’est réunie le 18 décembre, le Sénat a inscrit à son ordre du jour du 15 janvier 2025 la proposition de loi visant à prolonger la dérogation d’usage des titres-restaurant pour tous les produits alimentaires. Alors que l’Assemblée nationale avait voté pour une prolongation pour deux ans, la commission des affaires sociales du Sénat avait décidé le 4 décembre 2024, de limiter à un an la prolongation de cette dérogation d’utilisation, c’est-à-dire jusqu’au 31 décembre 2025.
Une nouvelle prolongation de ce régime dérogatoire en 2025 est donc très probable.
Taux de cotisation AT/MP
En l’absence de vote de la loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2025, les arrêtés portant sur le taux de cotisation AT/MP ne pourront pas être publiés avant le 31 décembre 2024.
Par conséquent, l’assurance maladie indique sur son site, le 17 décembre 2024 que le taux de cotisation 2024 s’appliquera jusqu’à la publication des nouveaux taux et qu’aucune notification de taux ne sera donc adressée début janvier.
Dès qu’une loi de financement de la Sécurité sociale sera promulguée et les arrêtés pris en conséquence, les entreprises recevront leur notification de taux 2025.
Mesures susceptibles de figurer dans le prochain PLFSS
Pour fixer les mesures applicables en matière de sécurité sociale en 2025, le nouveau gouvernement pourrait décider, soit de repartir du PLFSS tel qu’il a été adopté en commission mixte paritaire, soit de présenter un texte nouveau.
Dans ce contexte, nous vous proposons un bref tour d’horizon des principales mesures qui figuraient dans le projet de loi initial et qui pourraient être reprises par le nouveau gouvernement.
Indemnités journalières de sécurité sociale
Le projet de loi prévoyait que, en cas de fraude avérée d’un assuré en vue du versement d’indemnités journalières, l’organisme de sécurité sociale transmet à l’employeur les renseignements et les documents strictement utiles et nécessaires à la seule fin de caractériser ladite fraude. Cette information est réalisée par tout moyen permettant de garantir sa bonne réception par l’employeur.
Rappelons à cet égard qu’un projet de décret prévoit également d’abaisser le plafond de revenus d’activité antérieurs, pris en compte pour le calcul des indemnités journalières, de 1,8 à 1,4 fois le salaire minimum de croissance pour les arrêts de travail débutant à compter du 1er janvier 2025.
Réduction des allègements de cotisations sociales
Actuellement, les dispositifs d’exonération générale incluent la réduction générale de cotisations patronales jusqu’à 1,6 SMIC, un taux réduit de la cotisation patronale d’Assurance maladie pour les rémunérations inférieures à 2,5 SMIC et un taux réduit de la cotisation patronale d’allocations familiales pour les rémunérations inférieures à 3,5 SMIC.
Le projet de loi prévoyait une baisse des allègements de cotisations patronales en 2025. Cette réduction du taux de la cotisation patronale d’assurance maladie visait les salariés dont la rémunération ne dépasse pas 2,25 SMIC, le taux réduit de la cotisation patronale d’allocations familiales concernait les rémunérations jusqu’à 3,3 SMIC.
En outre le projet de loi prévoyait la fusion des trois allègements généraux de cotisations patronales en une seule réduction dégressive en 2026.
Enfin, dans les entreprises relevant d’une branche dont les salaires minima sont inférieurs au SMIC pendant l’année civile précédant le calcul des allègements généraux, ces derniers seraient établis sur la base du salaire minima et non plus sur la base du SMIC, dès lors qu’aucun accord d’entreprise ni aucune décision unilatérale de l’employeur n’a prévu, au cours de l’année civile précédant le calcul, des salaires supérieurs au SMIC applicable.
Enfin, les primes de partage de la valeur versées seraient intégrées dans l’assiette de calcul des allègements généraux de cotisations.
Rémunération des apprentis
Le projet de loi prévoyait d’assujettir à la CSG et à la CRDS les rémunérations des apprentis au-delà de 50% du SMIC.
De plus, il était prévu d’abaisser par décret de 79% à 50% du SMIC la part de rémunération sur laquelle les apprentis bénéficient d’une exonération de cotisations sociales.
Rappelons en dernier lieu que l’aide exceptionnelle versée aux employeurs d’apprentis n’entrant pas dans le champ d’application de l’aide unique, dont l’application a été prolongée par un décret n°2023-1354 du 29 décembre 2023, cesse de s’appliquer au 31 décembre 2024.
Cette aide exceptionnelle, qui s’élève à 6000 euros pour la seule la première année complète de formation est accordée aux entreprises de toutes tailles (sous conditions pour celles de 250 salariés et plus) qui embauchent un apprenti jusqu’au niveau 7 inclus (Bac+5).
Or le décret permettant sa prolongation ne pouvant être pris par un gouvernement « démissionnaire », seule est maintenue l’aide unique à l’apprentissage d’un montant de 6000 euros pour les entreprises de moins de 250 salariés et pour les seuls apprentis préparant un diplôme de niveaux 3 et 4 (CAP et Bac professionnel ou équivalents)
Contribution patronale sur l’attribution gratuite d’actions
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoyait également de relever le taux de la contribution patronale due sur les attributions gratuites d’actions de 20% à 30%.
Certaines de ces mesures pourraient être reprises par les nouveaux projets de textes budgétaires qui seront présentés au parlement, au mieux, au début du mois de février 2025. A suivre donc.
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