Adoption du règlement 2017/352 établissant un cadre pour la fourniture de services portuaires et des règles communes relatives à la transparence financière des ports
Seize ans après la soumission par la Commission européenne d’une première proposition législative en ce sens, le législateur européen a finalement adopté le règlement 2017/352 du 15 février 2017 établissant un cadre pour la fourniture de services portuaires et des règles communes relatives à la transparence financière des ports.
Ce règlement s’applique en principe à tous les ports maritimes du réseau transeuropéen de transport, ce qui concerne plus de 300 ports maritimes dans l’Union européenne (UE). Les États membres peuvent toutefois décider d’en étendre l’application à d’autres ports maritimes ou au contraire d’y soustraire les ports situés dans les régions ultrapériphériques de l’UE.
Le règlement maintient la possibilité pour les États membres de décider du régime de propriété applicable aux ports maritimes et permet donc la coexistence de différentes structures portuaires au sein de l’UE, position qui était particulièrement défendue par la France (le communiqué de presse d’Alain Vidalies, secrétaire d’Etat chargé des transports, du 30 juin 2016).
Dans le même temps, il prévoit un ensemble de règles communes visant à faciliter l’accès au marché des services portuaires et à accroître la transparence financière des ports afin d’améliorer la qualité et l’efficience des services fournis aux utilisateurs et de contribuer aux investissements dans les ports.
Les services portuaires concernés sont le soutage, la manutention des marchandises, le lamanage, les services passagers, la collecte des déchets d’exploitation des navires et des résidus de cargaison, le pilotage et le remorquage (article 1er, § 2). L’on notera que, au terme d’âpres négociations, la France a obtenu l’exclusion de certains services du champ d’application des dispositions du règlement relatives à la fourniture de services portuaires, dont le pilotage (article 10) et le dragage (article 1er, § 3), ces services restant par ailleurs soumis, en tout ou en partie, aux dispositions relatives à la transparence financière des ports.
S’agissant de la fourniture des services portuaires (articles 3 à 10), le règlement prévoit que les Etats membres doivent s’assurer que les conditions d’accès aux infrastructures, installations et équipements des ports sont équitables, raisonnables et non discriminatoires. Il leur laisse cependant la possibilité de restreindre cet accès tout en l’encadrant. Ceux-ci peuvent ainsi :
- soumettre l’accès au marché de la fourniture de services portuaires à des exigences minimales limitativement énumérées (relatives par exemple à la qualification professionnelle des fournisseurs de service ou encore à l’équipement nécessaire pour fournir les services) ;
- limiter le nombre de prestataires au sein des ports, à l’issue d’une procédure de sélection qui doit être ouverte, non discriminatoire et transparente et être fondée sur des motifs clairs et objectifs qui ne créent pas d’entraves sur le marché ;
- imposer des obligations de service public à des prestataires de services portuaires, afin de garantir par exemple la disponibilité du service portuaire pour l’ensemble des utilisateurs du port sans interruption ou l’accès à des prix abordables.
La libéralisation des services portuaires est ainsi limitée, conformément au souhait de la France qui a œuvré pour maintenir des services publics de qualité et ainsi imposer le « modèle portuaire français ».
S’agissant de la transparence des redevances financières et du financement public des ports (articles 11 à 13), le règlement prévoit notamment l’obligation de tenir une comptabilité analytique permettant de séparer les activités de service portuaire ou de dragage financées par les fonds publics des autres activités.
Il précise également que les redevances relatives aux services portuaires doivent être fixées de manière transparente, objective et non discriminatoire ainsi qu’être proportionnées au coût du service fourni. Les redevances relatives aux infrastructures portuaires doivent quant à elles être déterminées en fonction de la stratégie commerciale et des plans d’investissement de chaque port.
Ces dispositions ont pour but de garantir des conditions de concurrence équitables et d’éviter les distorsions du marché en permettant un contrôle accru des aides d’État attribuées aux ports.
Auteurs
Claire Vannini, avocat associé en droit de la concurrence national et européen
Sabrina Ledda-Noël, avocat, droit européen et droit des produits de santé