Signature d’un accord historique entre l’État, le régulateur et les opérateurs mobiles pour accélérer la couverture mobile sur l’ensemble du territoire
A l’issue d’une concertation menée avec l’ensemble des acteurs (opérateurs et collectivités locales), s’inspirant des accords trouvés dans les pays les plus connectés, l’ARCEP a remis au Gouvernement une proposition comprenant de nouvelles obligations de déploiement pour les opérateurs destinées à généraliser la couverture mobile de qualité pour l’ensemble des Français.
L’État a ainsi fait le choix :
- de prioriser l’objectif d’aménagement du territoire dans les conditions d’attribution des fréquences mobiles dont les autorisations arrivent à terme dans les prochaines années ;
- d’accompagner l’effort massif d’investissement des opérateurs d’un engagement de stabilité des redevances payées par ces derniers pour ces fréquences ; et
- d’adopter des mesures de simplification, prévues dans le projet de loi ELAN (cf. ci-dessus).
Quels engagements des opérateurs faut-il retenir de cet accord ?
- Premièrement, améliorer la qualité de réception sur l’ensemble du territoire, et particulièrement dans les zones rurales.
Pour atteindre l’objectif d’une « bonne couverture », les opérateurs devront, notamment :
- partager les installations passives sur les sites où le partage de réseau d’accès radioélectrique (RAN sharing) par l’utilisation commune par les opérateurs d’équipements actifs et de leurs fréquences assignées n’est pas possible ;
- consulter les autres opérateurs, lors de l’installation sur un nouveau pylône, pour savoir s’ils veulent également s’installer sur le pylône, et dans ce cas accepter les demandes raisonnables de partage passif, dans des conditions garantissant l’effectivité de l’accès. Cette obligation s’appliquerait aux sites sur lesquels les opérateurs s’installent au sein de la zone de déploiement prioritaire à compter de la délivrance des nouvelles autorisations d’utilisation de fréquences.
La nécessité d’une telle obligation de mutualisation pourra toutefois être réévaluée au regard de l’évolution des conditions du marché.
- Deuxièmement, multiplier le rythme des programmes ciblés d’amélioration de la couverture et pour chaque opérateur construire au moins 5 000 nouveaux sites sur tout le territoire, parfois mutualisés, qui iront au-delà des « zones blanches » et qui seront intégralement pris en charge par les opérateurs.
Lorsqu’un opérateur identifie une zone où il n’est pas présent et que les élus lui demandent d’en améliorer la couverture, il aura l’obligation :
- d’apporter un service voix/SMS et un service mobile à très haut débit (4G) :
– au plus tard 12 mois après la mise à disposition d’un terrain viabilisé et raccordé au réseau électrique par une collectivité territoriale, identifié en concertation avec les opérateurs, et la délivrance des autorisations d’urbanisme
– ou sinon au plus tard sous 24 mois - prendre à sa charge l’ensemble des coûts (équipements actifs, construction d’un éventuel pylône, collecte, etc.)
- dans le cas où aucun opérateur ne disposerait d’une bonne couverture voix/SMS sur la zone considérée, en mutualisant en RAN sharing avec l’ensemble des opérateurs parties au dispositif et, dans les autres cas, en partageant a minima les éléments passifs d’infrastructures avec les autres opérateurs ayant reçu une demande de déploiement sur la zone.
Ce dispositif se substituera ainsi au programme France Mobile, en démultipliant ses effets, tout en permettant aux collectivités territoriales d’y être davantage associées.
- Troisièmement, généraliser la réception en 4G en l’apportant à plus d’un million de Français sur 10 000 communes, et en équipant en 4G tous les sites mobiles.
A l’exception des sites du programme « zones blanches centres-bourgs », les opérateurs devront fournir à ce titre un service très haut débit mobile sur l’ensemble des sites d’ici fin 2020 en équipant en 4G tous leurs sites existants (2G/3G) ainsi que les nouveaux.
Pour assurer la disponibilité d’un service 4G de bonne qualité, le déploiement de la 4G devra être accompagné d’une collecte suffisante. Les opérateurs devront dimensionner leurs sites de sorte à assurer en zone peu dense un service raisonnablement équivalent à celui qu’ils offrent sur le reste du territoire.
- Quatrièmement, accélérer la couverture des axes de transport, afin que les principaux axes routiers et ferroviaires (y compris régionaux) soient couverts en 4G.
S’agissant des axes routiers prioritaires (autoroutes et axes routiers reliant le chef-lieu de département aux chefs-lieux d’arrondissements), Orange, SFR et Bouygues Telecom s’engagent à assurer leur couverture en voix/SMS et en très haut débit mobile (4G) d’ici fin 2020 avec un premier niveau de qualité.
Par ailleurs, pour ce qui concerne les futures autorisations d’utilisation des fréquences 1800 MHz qui seront attribuées à l’issue de la procédure de réattribution des fréquences, les opérateurs qui ont déjà l’obligation de couvrir en 2G ces axes au titre d’autorisations d’utilisation de fréquences accordées avant 2010 devront rendre ces services -voix/SMS et très haut débit mobile (4G)- disponibles avec une qualité plus élevée au plus tard 10 mois après la mise à disposition des fréquences de la bande 1800 MHz. Les autres opérateurs qui obtiendraient des fréquences dans la bande 1800 MHz à l’issue de la procédure de réattribution devront respecter cette même obligation 24 mois après la mise à disposition des fréquences de ladite bande.
S’agissant du réseau ferré régional, les opérateurs qui obtiendront des fréquences dans la bande 1800 MHz à l’issue de la procédure de réattribution devront couvrir 90 % des lignes d’ici fin 2025, à des fins de collecte de la couverture wi-fi à l’intérieur des trains.
- Enfin, généraliser la couverture téléphonique à l’intérieur des bâtiments, en utilisant notamment la voix sur wi-fi.
Orange, SFR et Bouygues Telecom s’engagent à mettre en service en 2018 les services Voix et SMS sur wi-fi sur leur cœur de réseau, et à activer l’option par défaut pour tous les clients ayant un terminal compatible. Free Mobile, quant à lui, s’engage à mettre en service la voix et les SMS sur wi-fi d’ici fin 2019, ou à apporter un service équivalent.
En complément, les quatre opérateurs s’engagent à disposer d’ici fin 2018 d’une offre permettant à des entreprises ou des personnes publiques, pour un tarif abordable, de demander une amélioration de la couverture des services Voix et SMS et données à l’intérieur des bâtiments, pour permettre aux clients d’avoir accès à la couverture de l’ensemble des opérateurs.
L’information sur l’avancement de ces déploiements sera assurée par l’observatoire trimestriel de l’ARCEP sur la couverture mobile des zones peu denses ainsi que par les cartes de couverture, que l’Autorité publie sur le site monreseaumobile.fr.
Ces nouvelles obligations seront transcrites également dès 2018 dans les autorisations d’utilisation de fréquences des opérateurs. Elles auront un caractère contraignant et pourront faire l’objet de sanctions par l’ARCEP en cas de non-respect, sur le fondement de l‘article L.36-11 du Code des postes et des communications électroniques.
L’ARCEP lancera également début 2018 les travaux pour la réattribution des fréquences des bandes 900/1800/2100 MHz arrivant à échéance au cours des prochaines années, en intégrant ces ambitions, et en renonçant aux enchères sur les fréquences et à une augmentation des redevances associées.
Auteur
Audrey Maurel, avocat, droit des communications électroniques