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Système de remises fidélisantes

Système de remises fidélisantes

L’Autorité de la concurrence (ADLC) a infligé une amende record de 350 millions d’euros à la société Orange en raison de pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre sur le marché des services de téléphonie fixe et mobile à destination de la clientèle « entreprise ».

Plus précisément, l’opérateur historique a été sanctionné à double titre :

  • d’une part, pour avoir abusé de sa position dominante sur le marché des services mobiles en ayant recouru, de manière systématique et généralisée depuis les années 2000, à différents mécanismes de fidélisation de sa clientèle (programmes de commercialisation et remises tarifaires anticoncurrentielles), appliqués cumulativement et subordonnés à des engagements de durée et de volume, qui n’avaient pas permis aux entreprises clientes de faire jouer la concurrence en les dissuadant de transférer une partie de leur parc à d’autres opérateurs de téléphonie (effet de verrouillage du marché et d’éviction des concurrents) ;
  • d’autre part, pour avoir mis en œuvre, sur le marché des services fixes, une pratique de discrimination à l’égard d’opérateurs tiers en ce qui concerne l’accès et l’utilisation d’informations relatives à la gestion de la boucle locale cuivre issues de l’ancien monopole historique et dont le contenu apparaît comme une élément crucial de l’offre de détail de ces opérateurs auprès des entreprises.

Pour l’ADLC, ces pratiques ont constitué, au détriment des opérateurs concurrents comme de l’ensemble des entreprises, des obstacles significatifs et cumulatifs au changement d’opérateur et ont ainsi contribué à rigidifier un marché qui présentait déjà une fluidité réduite en raison de la réticence des entreprises à changer d’opérateur compte tenu de la complexité du processus de migration.

Orange a opté pour une stratégie de coopération avec l’ADLC en ne contestant pas les pratiques d’éviction et de discrimination reprochées, ni même – de façon novatrice, nous apprend le résumé de la décision devant être publié par Orange – la sanction infligée ainsi que les injonctions prononcées par ailleurs en vue de rétablir, au plus tôt, un fonctionnement concurrentiel du marché (mise en place sous 18 mois d’un dispositif garantissant aux opérateurs la fourniture des informations de la boucle locale cuivre dans les mêmes conditions que celles dont bénéficient les propres services d’Orange ; cessation des pratiques de remises fidélisantes et abstention à l’avenir de mise en œuvre de pratiques similaires ; cessation des remises d’exclusivité et abstention de mise en œuvre de toute pratique équivalente).

Le choix d’Orange de ne pas contester les griefs, avec de telles conditions, a permis des gains procéduraux pour l’Autorité. De ce fait, l’amende infligée a sans doute été moindre que celle susceptible d’être prononcée au regard de la gravité des pratiques soulignée par l’Autorité, même s’il s’agit de la sanction la plus élevée jamais prononcée à l’encontre d’une entreprise individuelle. Il est d’ailleurs à noter que le montant de 350 millions d’euros correspondant précisément à la sanction pécuniaire maximale proposée par le rapporteur général de l’ADLC reste, même de justesse, dans la fourchette proposée par ce dernier. En suivant son rapporteur général sur ce point, le collège de l’Autorité a fait ici une application anticipée de la procédure de « transaction » mise en place par la loi Macron du 6 août 2015, à laquelle elle fait d’ailleurs expressément référence (point 263). Applicable aux affaires dans lesquelles les griefs auront été notifiés après la publication de la loi, cette procédure permet, en effet, au rapporteur général de soumettre à l’entreprise ayant choisi de ne pas contester les griefs, « une proposition de transaction fixant le montant minimal et le montant maximal de la sanction pécuniaire envisagée » (voir notre Flash info Loi Macron – Volet Concurrence).

ADLC décision 15-D-20 du 17 décembre 2015 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des communications électroniques

Auteur

Denis Redon, avocat associé, CMS Bureau Francis Lefebvre Paris, en droit de la concurrence