Traitement des données des candidats : La CNIL publie un guide sur le recrutement

3 mai 2023
Le 30 janvier 2023, la CNIL a publié sur son site internet un guide à destination des recruteurs afin de les accompagner dans leur mise en conformité à l’égard du Règlement Général sur la Protection des Données.
Ces précisions étaient attendues par les professionnels car la position de la CNIL en la matière n’avait pas été actualisée depuis une délibération du 21 mars 2002.
La publication de ce guide est l’occasion de refaire le point sur les questions relatives au traitement des données personnelles qui se posent fréquemment lors des processus de recrutement.
1. Combien de temps est-il possible de conserver les données personnelles d’un candidat qui n’a pas été retenu?
Les informations collectées à l’occasion d’un processus de recrutement ne peuvent pas être conservées indéfiniment par le recruteur. Une durée de conservation de ces informations doit être définie en amont. Celle-ci doit être cohérente et justifiée en fonction de l’objectif poursuivi par le traitement mis en œuvre
L’employeur peut conserver les candidatures non retenues jusqu’à trois mois après l’aboutissement du processus de recrutement, afin de pouvoir leur expliquer les raisons de cette décision.
Si le candidat y consent, il est possible de conserver les données après la prise de décision concernant l’embauche pour une durée plus longue, qui devra être fixée en considération du type de poste concerné et ne devrait pas dépasser deux ans à compter du dernier contact avec le candidat non retenu.
Cette conservation des données doit avoir pour seul objectif :
-
- de recontacter le candidat en cas de nouvelles opportunités ;
-
- ou d’alimenter une base de données du type «vivier de candidats».
Les informations des candidats peuvent néanmoins encore présenter un intérêt après cette période, notamment pour la gestion d’un éventuel contentieux tel qu’une action en discrimination.
Il est dès lors possible de conserver ces informations en base intermédiaire, où elles pourront être consultées mais de manière ponctuelle et motivée, par des personnes spécifiquement habilitées (par exemple le service juridique) pour une durée de cinq ans.
2. Le recruteur doit-il informer le candidat de ses droits à l’égard de ses données?
Les candidats disposent de droits d’accès, de rectification, de suppression et de portabilité des données les concernant, ainsi que de droits d’opposition ou de limitation du traitement de leurs données.
L’information aux candidats doit être délivrée de façon concise, transparente, compréhensible et aisément accessible.
Il est recommandé de travailler sur un support écrit rendant l’information la plus intelligible possible.
Les supports utilisés peuvent être multiples : mention insérée dans la rubrique dédiée au recrutement sur le site web de l’employeur, mention d’information individuelle insérée directement dans l’offre d’emploi publiée par le recruteur, mention d’information individuelle figurant dans l’accusé de réception de la candidature en complément d’une information préalable, etc.
3. L’employeur peut-il demander à un candidat une copie de son casier judiciaire?
Le casier judiciaire d’une personne est composé de trois bulletins (B1, B2 et B3) dont le contenu, les personnes et les organismes habilités à les consulter varient en fonction du bulletin visé.
La consultation et la délivrance d’un extrait de casier judiciaire doit, comme pour toute donnée à caractère personnel collectée à l’occasion du processus de recrutement, présenter un lien direct et nécessaire avec le poste à pourvoir.
Le bulletin B1 (qui contient l’ensemble des condamnations et des décisions de justice d’une personne) n’est accessible qu’aux autorités judiciaires et aux établissements pénitentiaires. Il n’est donc pas accessible au recruteur.
Des textes peuvent prévoir pour l’accès à certaines fonctions dites « sensibles », la vérification, par l’employeur du bulletin B2 (qui contient les mêmes éléments que le bulletin B1, à l’exception de certaines décisions et condamnations). C’est notamment le cas pour les professions au contact des mineurs. En l’absence de texte le prévoyant, un employeur ne pourra pas avoir accès à ce document.
Le bulletin B3 contient uniquement les condamnations pour crimes et délits les plus graves. En cas de nécessité en lien direct avec le poste à pourvoir et à condition de justifier de la conformité au code du travail, l’employeur pourra demander à consulter un extrait papier du bulletin B3 du candidat, sans le conserver, ni en faire de copie.
4. Est-il possible de collecter des informations relatives à la nationalité d’un candidat?
Les informations demandées par le recruteur doivent avoir pour seule finalité d’apprécier les aptitudes professionnelles du candidat ou sa capacité à occuper le poste proposé. La collecte de données relatives à la nationalité d’un candidat sera donc justifiée lorsqu’elle sera nécessaire à cette appréciation.
Pour répondre à l’obligation légale de vérification des titres autorisant les personnes de nationalité étrangère à travailler en France, il est justifié de demander au candidat sa nationalité.
Dans le cas des candidats de nationalité étrangère, la capacité à occuper le poste suppose notamment la possession d’un titre les autorisant à travailler en France. Les informations relatives à la possession d’un tel titre font donc partie des données susceptibles d’être collectées dans le cadre du recrutement.
Le recruteur peut demander au candidat les seules pièces justificatives et informations qui lui sont nécessaires pour s’assurer que celui-ci est en règle pour travailler en France.
La collecte d’informations telles que la nationalité des parents du candidat, des informations relatives au mode d’acquisition de la nationalité française, ou à la date de naturalisation, serait en revanche disproportionnée et dépourvue de tout lien avec le contrôle des conditions juridiques pour occuper le poste proposé.
5. Peut-on faire passer un test de personnalité aux candidats?
Il n’existe aucun texte spécifique encadrant le recours à de tels outils.
Ces méthodes doivent toutefois respecter la réglementation applicable tant en droit du travail qu’en matière de protection des données.
En particulier, elles ne peuvent être utilisées qu’à la condition de présenter un lien objectif, direct et nécessaire avec l’appréciation de la capacité à occuper l’emploi proposé ou les aptitudes professionnelles des candidats.
Les candidats bénéficient à cet égard d’un droit renforcé à la transparence, l’employeur ayant l’obligation de les informer expressément et préalablement à la mise en œuvre, des méthodes et techniques d’aide au recrutement utilisées.
Aurélie Parchet, Avocat et Maxime Hanriot, Avocat, CMS Francis Lefebvre Avocats
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