Trois observations pratiques sur les conventions réglementées
Avec la période des assemblées générales revient la question lancinante des conventions réglementées. Discuter des conventions conclues par la société et entrant dans cette catégorie constitue un passage obligé dans la plupart des sociétés. Bien rares sont en effet les sociétés qui n’ont pas effectué, au cours de l’exercice, des opérations avec une partie liée : dirigeant, actionnaire significatif, société ayant un dirigeant commun, etc.
Ce dispositif est bien connu des directions juridiques et des avocats, même s’il est régulièrement modifié – la loi PACTE apportera par exemple son lot de retouches, particulièrement au régime des SA. C’est qu’en réalité, il n’y a pas un mais plusieurs dispositifs des conventions réglementées, chacun avec ses spécificités, seules certaines formes sociales comme les sociétés en nom collectif échappant à cet encadrement.
Trois observations pratiques peuvent être faites.
Tout d’abord, s’agissant de la fréquence avec laquelle on déroule cette procédure, l’usage a été pris de la coupler avec l’approbation des comptes de l’exercice, et certains textes confortent cette approche, comme l’obligation désormais faite au conseil d’administration d’une SA de réexaminer chaque année les conventions précédemment autorisées « dont l’exécution a été poursuivie au cours du dernier exercice » (art. L. 225-40-1 C. com., ord. 31 juil. 2014). Pour autant, même si les textes n’indiquent pas que la convention réglementée doit être soumise à la plus prochaine assemblée générale des actionnaires, rien n’interdit de soumettre à approbation une convention qui aurait été conclue non pas pendant l’exercice clôturé dont les comptes sont examinés mais durant l’exercice en cours. Ainsi, une convention conclue au début de l’année 2019 pourrait être examinée par l’assemblée approuvant les comptes de l’exercice 2018.
Ensuite, à l’heure de statuer sur l’approbation de la convention, les actionnaires d’une SA ou les associés d’une SARL ou d’une SAS auraient en théorie intérêt à toujours se prononcer défavorablement, dès lors que le refus d’approbation ne prive pas d’effet la convention mais permet seulement à la société de demander aux personnes intéressées de l’indemniser des conséquences préjudiciables de l’accord, ce qu’elle ne pourrait faire si la convention a été autorisée. Maintenant, on comprend que les propositions d’approbation reçoivent généralement une réponse favorable. Une décision de refus d’approbation reflétera, y compris à l’égard des tiers, une mauvaise ambiance au sein de la société, et à l’heure de rechercher un financement ou d’accueillir de nouveaux associés, cette décision négative nuira à la société et finalement à l’ensemble des associés. En outre, si la société entend obtenir effectivement réparation du préjudice que lui aurait causé la convention, le refus d’approbation n’est qu’une première étape, et une demande en indemnisation devra être formée, puis portée devant les juges ou arbitres compétents, en cas de refus des intéressés de payer.
Enfin, il peut être tentant de soumettre à la procédure des conventions réglementées tout contrat pour lequel on a un doute. Cette prudence est porteuse de contraintes durables, car si l’on applique une première fois la procédure lors de la conclusion de la convention, il faudra renouer avec cette obligation lorsque le contrat sera modifié par voie d’avenant. Il faudra en outre, dans les SA, procéder à un réexamen annuel des conventions autorisées, ainsi qu’on l’a évoqué plus haut. Pour autant, ne pas appliquer la procédure là où elle est peut-être nécessaire peut être vu comme excessivement risqué notamment pour les dirigeants intéressés, et le choix de la prudence est généralement privilégié. Rappelons toutefois que le principe est la conclusion libre des conventions, la procédure des conventions réglementées constitue une exception à ce principe. Cette exception devrait être, comme toutes les exceptions, interprétée restrictivement.
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