Une marque consistant en une couleur appliquée sur la semelle d’une chaussure doit être traitée comme une marque de couleur
La société Christian Louboutin est titulaire dans plusieurs pays européens, dont le Benelux, d’une marque enregistrée consistant dans la couleur rouge (Pantone 18-1663TP) appliquée sur la semelle d’une chaussure, pour désigner des chaussures à talons hauts.
A la suite d’une action en contrefaçon engagée devant les tribunaux hollandais à l’encontre de la société Van Haren au motif que cette dernière avait commercialisé des chaussures pour femmes revêtues de cet élément distinctif, le tribunal de La Haye se demandait si la notion de « forme » prévue par l’article 3, de la directive 2008/95 du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des Etats membres sur les marques, applicable au moment des faits, était limitée aux seules caractéristiques tridimensionnelles d’un produit (contours, dimension, volume), ou si elle visait également d’autres caractéristiques, comme la couleur.
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) estime qu’en l’absence de définition de cette notion dans la directive, le terme « forme » doit être interprété conformément à son sens habituel dans le langage courant. La Cour précise qu’il ne ressort pas du sens usuel de ce terme qu’une couleur en elle-même, sans délimitation dans l’espace, peut constituer une « forme » de produit (CJUE, 1 2 juin 2018, C-163/16).
Ainsi, lorsque l’élément principal d’un signe enregistré comme marque est une couleur spécifique désignée par un code d’identification internationalement reconnu, ce signe ne peut être considéré comme consistant « exclusivement en une forme ». Or, la description de la marque de la société Louboutin excluait expressément le contour de la semelle des éléments de protection de l’enregistrement.
Partant, la Cour répond à la question préjudicielle que l’article 3, de la directive 2008/95, doit être interprété en ce sens que le signe en question ne consiste pas exclusivement en une « forme », au sens de cette disposition.
Cela étant, la décision de la CJUE concernant la directive 2008/95, remplacée depuis par la directive 2015/2436 du 16 décembre 2015, son impact reste à voir. En effet, si l’ancienne version de ce texte incluait l’expression « la forme qui donne une valeur substantielle au produit », la nouvelle rédaction de l’article 4, de la directive 2015/2436 ajoute les mots « ou une autre caractéristique » après le terme « forme ».
Auteur
José Monteiro, of Counsel, droit de la propriété intellectuelle