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Utilisation de l’amende civile pour sanctionner la rupture brutale de relations commerciales établies

Utilisation de l’amende civile pour sanctionner la rupture brutale de relations commerciales établies

En octobre 2016, deux sociétés du groupe Carrefour ont été condamnées, après une saga judiciaire composée de non moins de six décisions, au paiement d’une amende civile de 100 000 euros pour rupture partielle des relations commerciales établies avec un prestataire (Cass. com., 18 octobre 2016, n°15-13.834).

En l’espèce, les relations commerciales ayant uni ces deux sociétés à l’un de leurs prestataires avaient duré dix-sept ans et Carrefour avait annoncé y mettre fin, en octobre 2005, moyennant un préavis de quinze mois.

Le tribunal de commerce de Paris a considéré que ce préavis n’en était pas un puisque la rupture partielle des relations entre les sociétés Carrefour et leur prestataire datait en réalité du mois de janvier 2005, date à laquelle le chiffre d’affaires confié par Carrefour à son prestataire avait commencé à fortement diminuer. En conséquence, les sociétés Carrefour furent condamnées à indemniser leur cocontractant sur le fondement de l’article L.442-6 I 5° du Code de commerce. Jusque-là rien de novateur !

L’intérêt de cette saga judiciaire réside dans l’intervention à la procédure du ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie pour demander la condamnation des sociétés Carrefour au paiement d’une amende civile pour rupture brutale d’une relation commerciale établie.

Après de multiples rebondissements, la Cour de cassation a approuvé la cour d’appel de Paris qui avait jugé que, malgré la gravité modérée et l’effet limité de la pratique illégale en cause, le montant de l’amende civile prononcée à l’encontre de Carrefour devait prendre en compte l’importance du chiffre d’affaires des sociétés Carrefour et l’effet d’entraînement que pouvait avoir le comportement de sociétés de leur taille et de leur notoriété pour les autres opérateurs économiques.

Cette affaire est inédite en ce qu’elle témoigne d’une volonté de notre Gouvernement de renforcer, par l’utilisation de l’amende civile, les sanctions à l’encontre des grandes entreprises qui sont condamnées pour violation des règles issues du droit économique telles que codifiées au Code de commerce (sur ce point, voir également notre article « Confirmation de la condamnation d’un acteur de la grande distribution pour un déséquilibre significatif dans les contrats conclus avec ses fournisseurs »). Le relèvement de deux à cinq millions d’euros, par la loi dite « Sapin II » du 9 décembre 2016, du plafond de l’amende civile pouvant être prononcée en cas de rupture brutale des relations commerciales établies s’inscrit également dans cette logique (voir en ce sens notre flash info Concurrence « Loi Sapin II – Volet Relations commerciales« ).

 

Auteurs

Stéphanie de Giovanni, avocat, membre du Barreau de New York, Distribution et contrats internationaux.

Aliénor Fèvre, avocat en droit commercial et contrats internationaux.