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Quid de l’utilisation, dans le secteur concurrentiel, de données collectées par un opérateur placé en situation de monopole légal ?

Quid de l’utilisation, dans le secteur concurrentiel, de données collectées par un opérateur placé en situation de monopole légal ?

L’utilisation, dans le secteur concurrentiel, de données collectées par un opérateur placé en situation de monopole légal dans le cadre de sa mission de service public est susceptible d’enfreindre les règles de la concurrence.

Pour appréhender et faire cesser ces pratiques, les autorités de régulation privilégient les procédures négociées permettant aux entreprises d’élaborer, de façon volontaire et prospective, des solutions répondant aux préoccupations soulevées.

C’est le cas notamment de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER) et de l’Autorité de la concurrence, ainsi que le démontrent les deux exemples suivants.

Le 23 novembre 2016, l’ARAFER a émis un avis réservé sur le projet de plan de gestion des informations confidentielles élaboré par SNCF Réseau (avis n°2016-218). Rappelons que, pour l’exercice de ses missions, SNCF Réseau recueille auprès de ses clients des informations d’ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique, dont certaines revêtent un caractère sensible. Leur divulgation à des tiers, extérieurs aux services de SNCF Réseau chargés de la répartition des sillons et de la tarification de l’infrastructure, est interdite, car elle pourrait nuire à l’équilibre du jeu concurrentiel. Ce risque est d’autant plus avéré que SNCF Réseau est, au sein du groupe public ferroviaire, verticalement intégré avec l’opérateur historique de transport.

Afin d’assurer le respect de cette interdiction par le personnel de SNCF Réseau, la loi portant réforme ferroviaire a imposé à cette dernière de prendre des mesures d’organisation interne sous la forme d’un plan de gestion des informations confidentielles soumis à l’avis conforme de l’ARAFER. Ce plan définit le périmètre des informations confidentielles, précise leurs conditions d’utilisation et de diffusion et décrit le dispositif d’information, de formation et de contrôle de la mise en œuvre du plan par les personnels ayant accès à ces informations.

Dans son avis, l’ARAFER a indiqué que les mesures proposées ne lui paraissaient pas suffisantes et a formulé des propositions en vue de l’amélioration du plan de gestion. Elle a également mis l’accent sur la nécessité de la mise en œuvre effective, efficace et rapide de ces règles et a rappelé à SNCF Réseau qu’elle se montrera attentive aux évolutions du plan de gestion des informations confidentielles ainsi qu’à sa mise en œuvre.

Plus récemment, l’Autorité de la concurrence a été saisie de deux plaintes mettant en cause les pratiques mises en œuvre par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) et consistant pour lui à utiliser les informations privilégiées dont il dispose, en tant qu’opérateur de diagnostic préalable en situation de monopole légal, pour fausser le jeu de la concurrence sur l’activité de fouilles archéologiques préventives ouverte à la concurrence. L’Autorité relève qu’il n’existe pas, au sein de l’INRAP, d’organisation fonctionnelle distinguant de manière étanche les activités de diagnostic et de fouilles. Dans ces conditions, l’utilisation de ces informations est de nature à conférer à l’INRAP un avantage compétitif indu susceptible de se manifester lors de la formulation des offres commerciales et de la participation aux procédures d’appel d’offres.

L’INRAP a proposé deux engagements afin de répondre aux préoccupations de concurrence exprimées par l’Autorité et mettre ainsi fin aux poursuites : d’une part, à faire en sorte que le responsable scientifique des fouilles ne soit pas celui qui a assumé la responsabilité de la conduite du diagnostic préalable sur le même site ; d’autre part, à ce que l’ensemble des données scientifiques concernant les opérations de diagnostic, recueillies par ses agents, soit retranscrit intégralement et de manière exhaustive dans le rapport de diagnostic remis aux services de l’Etat.

Si ces propositions d’engagements sont acceptées, elles permettront à l’Autorité de mettre fin à la procédure avant tout constat d’infraction.

 

Auteurs

Claire Vannini, avocat associé en droit de la concurrence national et européen

Eleni Moraïtou, avocat en droit de la concurrence national et européen